🏥 Hospitalisation et polyhandicap : et si on écoutait les parents aidants ?
- lesouriredalexis
- 20 juil.
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 21 juil.
Et si on pouvait soigner autrement ? Réflexion d'une maman pour des soins plus humains et adaptés

Chaque hospitalisation avec un enfant polyhandicapé est un défi. Pour lui d’abord, parce que tout change brutalement : les repères, les sons, les visages, les gestes. Pour nous, parents, parce qu’on sait ce qui fonctionne, ce qui rassure, ce qui déclenche dans notre routine quotidienne… et qu’on perd bien souvent la main lors des hospitalisations, dès le pas de la porte franchi.
En Témoignant de ce que nous avons vécu — en bien comme en mal — je souhaite participer à un meilleur accompagnement dans l'avenir pour nos enfants qui ne parlent pas, mais qui ont pourtant tant à dire.
👩⚕️ Le parent, un coéquipier à ne pas négliger

Comme c'est agréable quand on est reconnu comme un coéquipier et pas comme un obstacle à tenir à l'écart !
Nous ne demandons pas à faire les soins à votre place, bien au contraire, on en fait bien assez à la maison. Mais nous savons des choses précieuses :
Quelle position pour qu'il soit confortable. Quelle veine fonctionne bien, laquelle ne tient jamais . Pourquoi ce bras-là est impossible à perfuser parce qu'on ne pourra pas mettre d'attelle à cause de la spasticité...
A t il peur, a t il mal ? Sa façon de l'exprimer peut être bien différente de celle de tout un chacun. Je sais quelle vibration, ou quelle musique peut l'apaiser pendant le soin...
C'est important de nous donner un rôle autre que celui de tenir notre enfant de force. Je suis votre médiateur, votre guide, celle qui peut sécuriser mon enfant mais également vous, le soignant, en balisant le soin.
Quand l'IDE me dit : “Vous êtes l’experte d’Alexis. Dites-moi tout ce que je dois savoir.” Alors je sais que tout se passera bien, parce que nous faisons équipe.
🎧 C'est peut être un détail pour vous...
Quand l'hypersensibilité s'en mêle

Les soins, les gestes techniques, les examens… tout cela peut basculer dans le cauchemar si on oublie que certains enfants sont hypersensibles.
Une lumière trop forte, trop directe.
Un bip qui sonne sans arrêt.
Un soin fait sans prévenir.
Des mains trop froides vécues comme une agression pour certains.
Un bruit de fond incessant dans le couloir, des portes qui claquent , un bruit qui fait peur.
Trop de monde en même temps autour de lui.
Chacun de ces faits peut suffire à déclencher un orage émotionnel, comportemental, voire neurologique.
Et pourtant, il suffirait de presque rien pour éviter cela :
Tamiser la lumière.
Mettre des bouchons d’oreille.
Lancer une musique avec son téléphone pour annoncer en douceur sa présence.
Prévenir avant chaque geste de soin en posant une main douce.
Cela ne prendrait que quelques secondes supplémentaires… mais pourrait éviter des heures de tension, de peur, voire de crise.
⏰ Respecter les rythmes et les routines de mon enfant : pas un caprice, mais nos repères vitaux

À l’hôpital, tout est cadencé pour que la machine bien huilée fonctionne correctement : repas à heure fixe, médicaments sur chariot, réveils matinaux, toilette le matin avant le passage des Drs, disponibilité du patient à tout moment...
Mais nos enfants polyhandicapés vivent sur des équilibres très fins.
Le sommeil est fragile, précieux.
La digestion dépend d'horaires précis de conditions favorables.
Les comportements dépendent souvent du cadre.
Quand on bouleverse tout cela, on ne comprend plus rien :
Est-ce que son comportement est lié à de la douleur ? Au stress ? Ou au changement de rythme ?
À la maison, nos routines, nos rituels, nous permettent de poser un cadre connu et un seul détail qui change nous met sur la piste d'un éventuel problème. Ici, on perd ce radar...
Et très souvent, des problèmes se surajoutent à ceux qu’on est venu soigner : constipation, crises, repli sur soi, spasticité, alimentation difficile, épuisement…
> Dans l'idéal , même à l’hôpital, et je dirai même d'autant plus à l'hôpital, on devrait pouvoir garder un minimum la main sur les horaires de prise des traitements, les temps de repos, l'alimentation, l'hydratation, et quand l'état de santé le permet la promenade et un temps d'activité. Ou tout au moins pouvoir les signaler et qu’on en tienne compte.
💥 La douleur : un cercle vicieux dans lequel on devrait ne pas mettre le pied

Chez une personne polyhandicapée, la douleur peut prendre mille visages :
Outre les pleurs et les gémissements ce peut être :
Un changement de tonus.
Des rires inappropriés.
Une agitation subite.
Un regard qui fuit.
Une absence de contact.
De l'épilepsie, etc...
Il existe des échelles spécifiques pour la repérer. Mais il existe surtout l’écoute du parent, qui sait très souvent quand quelque chose ne va pas.
Trop souvent la douleur est minimisée... On est occupé, ça peut attendre.
Ou sous évaluée : c'est pas si grave, faut pas exagérer...
Il faut prendre en compte plusieurs choses pour se mettre dans la peau d'une personne polyhandicapée :
Tout d'abord, elle ne comprend pas ce qui lui arrive et l'anxiété s'en mêle et majore l'épisode.
Deuxièmement, elle vit à l'instant présent, il n'y a pas de "ça va aller bientôt mieux " pour s'accrocher et tenir.
Et j'ajouterai qu'il ne faut jamais oublier que la douleur est totalement subjective. Certains vont ressentir un 10 quand d'autres sur le même événement donneraient un chiffre de 7 ! Ce n'est pas que l'un est plus chochotte que l'autre ! C'est que l'un a plus besoin d'être soulagé que l'autre. Nos corps nous envoient des messages, nous ne les maîtrisons pas et les personnes polyhandicapées, de par leurs pathologies peuvent être très douloureuses pour des situations où nous même ne serions pas dérangée dans notre quotidien.
La douleur chez nos enfants polyhandicapés ne doit jamais être banalisée, ne doit pas attendre. Une simple douleur peut finir en crise d'épilepsie, un vrai danger pour la vie de l'enfant.
> Alexis a souffert de spasmes violents toutes les 3 à 5 mins chaque nuit, pendant plusieurs heures d'affilées et cela pendant 2 ans et demi, sans qu’on parvienne à identifier l’origine.
Les 5 traitements anti épileptiques ont tous été doublés, sans résultat. Les nuits devenaient des cauchemars de spasmes pendant 5 à 6 heures et on nous a dit qu'on était arrivés au limites de la médecine...
Jusqu’au jour où un peu par hasard, je lui ai donné de l'ibuprofène au bon moment, et il n'a pas eu de crises... On a recommencé et même résultat...
Après quelques semaines de concertation avec les médecins, l'hypothèse de la douleur digestive s'est imposée.
Le Doliprane ne marchait pas, mais ça ne voulait pas dire qu'il n'y avait pas de douleur... D'autres médicaments aurait pu le soulager bien plus tôt, et éviter 2 ans et demi d'épilepsie et d'enfer ...
📋 Les protocoles ne remplaceront jamais le bon sens
Nos enfants ne rentrent pas dans les cases. Ils ont chacun leur manière d’appeler, de s'exprimer.
Bien souvent, l’instinct soignant vaut plus qu’un protocole.
Et le manque d'instinct peut s'avérer dramatique pour la personne polyhandicapée.

>Par 2 fois, Alexis a été hospitalisé en urgence en soins intensifs après que je l’ai récupéré du centre où il passait ses weekends de répit...
D'après eux, là-bas, il n'avait rien manifesté.
A chaque fois les symptômes ont explosé dans les 5 mins après son départ du centre... Fièvre à 41, crise d’épilepsie, vomissements intenses...
Il avait probablement essayé de s'exprimer mais n'avait pas été compris... L'IDE m'avait même dit "qu'il avait compris qui commandait ici "...

🤝 Conclusion : Et si on adaptait le soin à la personne ...
Je sais que par les temps qui courent c'est encore plus difficile, mais je reste persuadée qu’on peut soigner autrement. Ce n’est pas qu'une question de moyens, mais un état d’esprit.
Regardez la personne polyhandicapée comme une personne.
Regardez les parents comme des partenaires.
Dites vous qu’il y a toujours une intention de communiquer derrière un comportement.
Acceptez de faire un pas de côté. De ralentir. D’écouter.
Ce n'est pas du temps perdu, car au final le soin sera plus rapide que si on déclenche une crise !

Si vous êtes soignant, étudiant ou proche aidant, n’hésitez pas à partager cet article autour de vous. Chaque petit changement compte.
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